Le métavers, faut-il en avoir peur ?

MétaversAbolissant les frontières entre réel et virtuel, le métavers promet des expériences numériques uniques en leur genre. Dans cette course effrénée vers l’Internet 3.0, les GAFAM sont déjà en tête de liste. Mais que sait-on réellement du métavers ? Que propose-t-il de si novateur ? Et pourra-t-on laisser nos enfants y évoluer librement et en toute sécurité ? Mon enfant et les écrans a enquêté pour vous dans les méandres d’un lieu encore méconnu…

Définir le métavers

Étymologiquement parlant, « méta-vers » signifie littéralement « au-delà de l’univers ». Le terme fait son apparition pour la première fois au début des années 90 dans un roman de science-fiction de Neal Stephenson intitulé Le Samouraï virtuel. Une dystopie dans laquelle le héros fuit la réalité dans un monde virtuel plus vrai que nature !

Qu’est-ce que le métavers ?

Au fond, le métavers n’est pas si éloigné de la fiction. Il désigne un monde virtuel, persistant et dynamique au sein duquel plusieurs utilisateurs peuvent exister simultanément et interagir de manière infinie à travers leur avatar. Ce qui signifie que cet univers évolue à la fois avec et sans les utilisateurs qui y pénètrent à tour de rôle. Mélange de monde virtuel, de réalité augmentée et d’Internet, il imite le fonctionnement du monde réel, brouillant les pistes entre réalité et fiction.

Que peut-on faire sur le métavers ?

Travailler dans une salle de réunion virtuelle, faire du shopping, jouer à un jeu vidéo, suivre un cours, se promener, assister à un concert, visiter des sites touristiques… : le champ d’application du métavers est infini. Le petit plus ? Il permet de faire chacune de ces actions sans avoir à bouger de chez soi et avec un réalisme saisissant. Comme VRChat, cette application de rencontre en réalité virtuelle. Ou Facebook Workrooms, ce méta-univers numérique pour organiser des réunions professionnelles.

Quel intérêt de fréquenter le métavers ?

Expérience à 360°, le métavers permet de passer d’une expérience interactive bidimensionnelle depuis son smartphone à une expérience immersive tridimensionnelle grâce au casque de réalité virtuelle. À travers cette nouvelle technologie, l’Internet du futur promet des expériences en ligne en 3D bien plus sensorielles que celles que nous connaissons déjà. Et particulièrement dans l’univers des relations sociales !

Le métavers, un couteau à double tranchant

Trois-quarts des personnes considèrent (à raison !) que le métavers présente des risques importants pour leurs utilisateurs autant que des défis majeurs pour notre société. Les enjeux techniques et éthiques qu’il soulève doivent être au centre des préoccupations des GAFAM, des développeurs de jeux vidéo et des gouvernements.

Des perspectives de développement inespérées

En se superposant au monde réel, le métavers a la possibilité de venir l’améliorer. Les casques de réalité virtuelle ou les lunettes connectées permettent au chirurgien de voir sous la peau avant même d’avoir commencé à opérer, aux personnes souffrant d’Alzheimer de leur souffler un itinéraire, au pilote d’avion de s’entraîner à terre ou au spectateur d’un match de football de visualiser en direct les zones de hors-jeu. Des directions intéressantes motivées par les bienfaits que l’on peut en retirer !

Quid des données échangées

Comme tout espace numérique d’interactions, le métavers devrait voir s’échanger des données relatives à la protection de la vie privée. Nul doute que ces données en libre circulation seront stockées et utilisées à des fins mercantiles par les GAFAM. Si ce problème est récurrent depuis l’avènement des réseaux sociaux, il ne pourra que s’intensifier sur le métavers. On soupçonne son fonctionnement de pouvoir suivre en temps réel et interpréter les regards et les mouvements du corps et des mains à l’aune des émotions ressenties. Un partage d’informations personnelles à notre insu en somme…

Quand les gouvernements doivent s’emparer de ce sujet de société

D’un point de vue technique, le code du métavers devrait laisser le champ libre aux utilisateurs pour agir à leur convenance. Mais quel droit viendra s’appliquer en présence de délits à la propriété intellectuelle. Ou encore de difficultés de taxation d’entreprises ayant leur siège dans le métavers ou d’homicide d’un jumeau numérique ? Les États n’ont-ils pas pour mission de réguler l’utilisation du métavers en amont pour en assurer la sécurité de ses utilisateurs ? Dans ce cadre, peut-être faudrait-il y interdire tout ce qui n’est pas autorisé dans le monde réel ? D’autant que des agressions sexuelles sur le métavers de Facebook ont d’ores et déjà été signalées…

À quelles déviances nos enfants peuvent-ils être confrontés sur le métavers ?

Comme tout nouvel espace numérique peu modéré et disposant pour l’instant de peu d’outils de signalement, le métavers est un terrain fertile pour les contenus préjudiciables et les actions malveillantes. Sera-t-il possible de préserver les plus jeunes utilisateurs ?

Isolement social

D’après un sondage IPSOS pour Junior Connect, les 13-19 ans ont passé plus de 18h/semaine sur les écrans en 2022. Un chiffre en constante évolution ! Fortement incitatif, le métavers risque encore d’accroître leur temps passé sur les écrans, un casque de réalité virtuelle vissé sur la tête. On connaît déjà les risques qui peuvent découler d’une consommation importante d’écrans, tels que la sédentarité, la myopie ou encore la cybernétose (un mal de la réalité virtuelle qui se traduit par des nausées et des vomissements). Mais ce que l’anthropologue Fanny Parise redoute le plus, c’est le risque qu’un ado préfère sa vie virtuelle à sa vie réelle…

Violences verbales et haine en ligne

Antisémitisme, racisme, sexisme, homophobie : l’univers digital est le lieu de toutes les libertés, aussi blessantes soient-elles. Il n’est pas rare que de telles violences verbales dégénèrent en de la haine en ligne, voire en cyberharcèlement. Il y a fort à parier que le métavers ne sera pas exempt de tout reproche à cet égard. À moins que les avatars censés représenter leurs utilisateurs soient si lisses et si flatteurs qu’il y ait peu à en dire…

Mésinformation

Précurseur des métavers, le célèbre jeu vidéo Fortnite a souvent été le théâtre de scènes interdites aux mineurs. De la même manière, sur Roblox, plateforme populaire auprès des 7-17 ans, des villages virtuels inspirés de l’Allemagne Nazie ont été reproduits. Une fois encore, discuter avec vos enfants reste le meilleur moyen d’éveiller leur sens critique. Et ainsi de lutter contre la désinformation. D’autant qu’il est très difficile de repérer les propos et les agissements condamnables dans un espace où des millions de personnes interagissent…


L’essentiel

  • Le métavers est un monde virtuel en 3D qui va au-delà du réel.
  • Pour profiter de l’expérience du métavers, un casque de réalité virtuelle est nécessaire.
  • Au sein du métavers, de nombreuses professions pourront se former virtuellement avant d’exercer dans la vraie vie.
  • Violences verbales et agressions sexuelles : le métavers est d’ores et déjà un terrain fertile pour les agissements malveillants.
  • Échanger avec son enfant et modérer son temps d’écran est un préalable indispensable à toute utilisation du métavers.

Pour aller plus loin

  • En octobre dernier, la première Académie du Métavers a ouvert ses portes à Aulnay-Sous-Bois (93). Sous la houlette de Facebook, elle s’apprête à former des techniciens et techniciennes spécialisé(e)s dans ces nouveaux écosystèmes.