Éducation sexuelle sur Internet : bonne ou mauvaise idée ?

éducation sexuelleInternet, l’industrie pornographique, les communautés numériques et les réseaux sociaux ont révolutionné l’accès à l’information autour de la sexualité. À l’heure où la quasi-totalité des adolescents disposent d’un accès à Internet, nos jeunes sont plus que jamais exposés à des contenus à caractère sexuel. Nos jeunes peuvent-ils réellement faire leur éducation sexuelle en ligne ? Ces sources digitales peuvent-elles jouer de manière fiable le rôle de « professeurs » d’éducation sexuelle ? Et comment parler de sexualité avec nos enfants ? Mon enfant et les écrans vous donne les clés pour aborder ces sujets sensibles sans tabous ni clichés.

La pornographie : une sexualité idéalisée qui complexe

Selon une enquête menée par la fondation Ramsay Santé en janvier 2023, 64% des jeunes de 15 à 25 ans s’informent sur la sexualité par leurs propres moyens. La troisième raison pour laquelle les adolescents consomment de la pornographie est d’ailleurs pour « apprendre ». Cette idée largement répandue ne fait pourtant pas bon ménage avec une sexualité épanouie…

Qu’entend-on exactement par pornographie ?

Étymologiquement parlant, la pornographie vient du grec « porno » qui signifiait prostitution et « graphie » qui évoque la représentation. Au sens commun du terme, la pornographie regroupe l’ensemble des photos, vidéos, dessins, livre et même podcasts représentant des actes et fantasmes sexuels dans le but de susciter le désir et l’excitation chez ceux qui les regardent.

Un accès facile en ligne pour tous

Diffusée par le cinéma, la télévision, la presse écrite mais aussi dans le monde des arts, la pornographie a connu un souffle nouveau à l’ère d’Internet. Si la pornographie est autorisée en France (contrairement à d’autres pays), elle est interdite aux mineurs. Toutefois, entre l’opposition de certains sites pornographiques à vérifier l’âge de leurs visiteurs, la possibilité de contourner relativement facilement les contrôles parentaux, rendent facile l’accès à ces contenus en un clic. Ainsi, un tiers des mineurs s’y rendent. Ce qui représente tout de même, 2,3 millions de visiteurs uniques mensuels mineurs. Ce chiffre édifiant s’élève à 51% lorsqu’on interroge les garçons entre 12 et 17 ans. Soit 36% de plus qu’il y a cinq ans. Preuve, s’il en fallait, de l’extrême accessibilité de ces contenus qui peuvent heurter les plus jeunes.

Quels sont les risques d’une consommation abusive de pornographie ?

Hypermasculinité recherche de la performance, durée interminable des rapports, consentement systématique, représentation de sexes masculins démesurés, diktat des codes érotiques à travers l’épilation intégrale des sexes féminins : la pornographie véhicule de nombreuses représentations qui sont autant d’idées fausses. Or, le propre de l’éducation sexuelle est bien de donner aux enfants une vision positive de la sexualité tout en les informant des violences sexuelles.

Bien loin d’une approche éducative, les adolescents confrontés aux contenus pornographiques peuvent développer des complexes, des comportements à risque, voire des violences sexistes et sexuelles envers les femmes.

À cet égard, les effets du porno sur les adolescents sont un véritable sujet de société.

Les médias sociaux : une nouvelle révolution sexuelle

Si la plupart des plateformes interdisent la nudité et les contenus sexuellement explicites dans leurs conditions d’utilisations, les réseaux sociaux et les communautés numériques sont pourtant les supports préférés des adolescents pour trouver des réponses à leurs questions sur le sexe. Il faut dire qu’on y trouve des producteurs de contenus qui, à rebours du porno, abordent sans tabou des sujets recherchés par les jeunes et souvent éludés par l’éducation sexuelle scolaire.

Qui se cache derrière ces « nouveaux » influenceurs ?

Ils sont chargés d’éducation sexuelle dans les écoles, sexologues, gynécologues, illustrateurs ou encore travailleurs du sexe. Ils animent des comptes qui ont pour objectif de faire évoluer les discours sur le sexe. Engagés dans une démarche bienveillante, ces youtubeurs, instagrameurs et autres tiktokeurs proposent des contenus intéressants et rassurants aux antipodes des propos sexistes et des injonctions à la performance. Contre-proposition à la pornographie, ces ressources s’affichent comme de véritables sources d’informations pour aborder sans filtre toutes les questions que les adolescents se posent.

Que peut-on trouver sur ces comptes ?

De la masturbation à l’impuissance, en passant par le vaginisme ou l’asexualité, ces comptes n’ont de limite que les questions que leur posent les internautes. Lever le tabou sur la sexualité des jeunes filles, apprendre aux femmes à mieux comprendre leur corps et leur plaisir, renforcer la confiance en soi des personnes LGBTQ+, enseigner aux jeunes gens la question cruciale du consentement : autant de réponses qui apportent aux adolescents une connaissance claire et rapide de la sexualité. En libérant la parole, ces influenceurs contribuent à une nouvelle libération sexuelle.

Pourquoi ces comptes plaisent tant aux ados ?

Le propre d’Internet est de conférer à ses utilisateurs un anonymat certain. Et une fois n’est pas coutume, il est bon que les adolescents disposent d’un endroit discret pour explorer leurs questionnements sur la sexualité. Derrière leur écran, à l’abri des regards et des jugements, ils peuvent s’informer et se rassurer sur qui ils sont, ce à quoi ils ressemblent ou ce qu’ils ressentent, en toute confiance. Un lieu sûr bénéfique à leur développement, en somme.

Parents et éducateurs : un rôle à jouer

Cependant, malgré la place prépondérante que se sont arrogés les réseaux sociaux et les sites pornos dans l’éducation sexuelle de nos enfants, les parents et les éducateurs ont toujours un rôle majeur à jouer pour aider les jeunes à acquérir une image positive de leur sexualité. D’autant que l’adolescence est une période propice à l’expérimentation et la prise de risque !

Quid de l’éducation sexuelle à l’école ?

D’après la circulaire relative à la contraception de 2001, il est recommandé de dispenser dans les collèges et les lycées trois séances d’éducation sexuelle par an. Hélas, cette obligation n’est pas toujours mise en œuvre dans les établissements scolaires.

En outre, trop formelles, ces séances sont jugées insuffisantes par les élèves et bien éloignées des considérations pratiques qui les taraudent. Présentant souvent la sexualité sous l’angle des risques liés aux grossesses non désirées ou à la transmission des infections sexuellement transmissibles, elles éludent la question du plaisir et du consentement.

Côté enseignant, l’éducation sexuelle est aussi source de stress. Beaucoup déplorent le manque de formation qui les place dans l’incapacité de répondre de la juste manière aux questions des élèves.

Les parents, premiers responsables de l’éducation sexuelle de leurs enfants

Tous les experts de la petite enfance considèrent qu’il appartient aux parents de faire l’éducation sexuelle de leurs enfants. Selon Anne Bacus, psychologue, sexologue et psychothérapeute, « si nous confions aux autres (médias, sites Web, publicités ou grands de la cour d’école) le soin de s’en charger, [nos enfants] débuteront leur apprentissage avec une vision biaisée de la sexualité, ce qui ne facilitera ni leur vie intime, ni leur vie relationnelle ». Même si la pudeur est un frein, pensez à abordez avec lui les questions relatives à la sexualité !

Comment aborder la sexualité avec ses enfants ?

Pour commencer, laissez venir naturellement vos enfants vers vous. En temps et heure, ils viendront vous poser les premières questions qui les préoccupent. Pour ce faire, il est capital d’instaurer dès leur plus jeune âge un climat de confiance. Vos enfants doivent sentir qu’ils peuvent échanger avec vous librement sur tous les sujets.

Pour ne pas entrer dans des explications qui dépasseraient le niveau émotionnel de vos enfants, repartez toujours de leurs questionnements. Cela vous permettra d’évaluer leur niveau de connaissances, de rectifier éventuellement leurs fausses croyances et de les rassurer. Justement, la fonction rassurante est un élément clé de l’éducation sexuelle, surtout si votre enfant est tombé sur des images choquantes.

Enfin, si malgré tous nos conseils, la gêne vous empêche d’échanger avec vos enfants, n’hésitez pas à déléguer cette tâche à votre conjoint(e), à un ami ou à un professionnel. Le pire est qu’ils aillent chercher des réponses sur les sites pornographiques…


L’essentiel

  • La pornographie met en exergue une image fausse de la sexualité.
  • Utiliser la pornographie comme source principale d’information sur la sexualité peut entraîner des comportements inappropriés.
  • Il existe des contenus sur Internet qui abordent sans tabou toutes les questions liées à la sexualité des jeunes gens.
  • Les parents ne doivent pas perdre de vue leur rôle essentiel en matière d’éducation, y compris sexuelle.

Pour aller plus loin

  • La plateforme onSEXprime.fr est le dispositif gouvernemental dédié à l’éducation sexuelle des jeunes de 11 à 18 ans. Si votre enfant se pose des questions sur la sexualité, il est fort probable que leurs contenus simples, adaptés et validés par des experts y répondent. Mention spéciale pour leurs web séries qui facilitent l’ouverture du dialogue avec son adolescent !
  • Je protège mon enfant de la pornographie, conçu pour les parents a pour objectif de les accompagner à la mise en place du contrôle parental. Mais aussi de proposer des contenus d’éducation à la sexualité pour libérer la parole entre parents et enfants autour de ces questions.