Éveil amoureux et pratiques à risque 2.0

Révolution numérique oblige, internet s’est invité dans le quotidien de nos enfants jusque dans leur sphère intime. À l’ère du digital, l’éveil affectif et amoureux se déroule – au moins partiellement – en ligne. Un basculement qui comporte son lot de pièges et de pratiques à risque…

La banalisation de la pornographie

Quelques clics suffisent pour accéder gratuitement à des contenus pornographiques en ligne, sans même avoir à prouver son âge ou son identité. Une facilité d’accès qui n’est pas sans conséquence.

Un accès précoce

Entre février 2016 et mars 2017, la sexologue Bénédicte de Soultrait a conduit une étude intitulée « La pornographie : qu’en penses-tu ? ». Publiée sur le site Fil Santé Jeunes, cette enquête a mis en lumière la précocité du premier accès à la pornographie en ligne. Avant l’âge de 12 ans, 43 % des garçons et 34 % des filles ont ainsi déjà visionné des contenus à caractère pornographique.

Le sceau du secret

Entre 2017 et 2018, Yaëlle Amsellem-Mainguy, chargée d’études à l’INJEP, et Arthur Vuattoux, ingénieur de recherche à l’EHESP, ont enquêté sur l’éveil à la sexualité en ligne. Conclusion ? Le secret joue un rôle essentiel dans l’accès précoce à la pornographie sur internet. En effet, c’est le plus souvent dans l’intimité de leur chambre et sous couvert d’anonymat que les adolescents consultent des contenus à caractère pornographique. Avec le risque d’assimiler une vision erronée de la sexualité et des relations amoureuses.

Le sexting, dérive de la séduction en ligne

À l’abri derrière leur écran et loin du regard des adultes, les adolescents font l’expérience grisante de la liberté sur la Toile. Une quête qui les conduit parfois à pratiquer le sexting. Cet anglicisme désigne le fait d’envoyer des messages à caractère sexuel sous forme de textos, de photos ou de vidéos.

Une pratique en hausse

Le sexting tend à se banaliser chez les plus jeunes, comme le montre l’étude JAMES conduite par le professeur Daniel Süss au sein de l’université de Zurich. Entre 2014 et 2016, le nombre de jeunes âgés de 12 à 19 ans déclarant avoir déjà reçu des messages à caractère érotique a bondi de 16 %. Il ne s’agit donc pas d’un épiphénomène mais d’une tendance de fond.

Des motivations diverses

L’Institut universitaire de médecine sociale et préventive de Lausanne a publié en février 2017 un dossier sur la pratique du sexting à l’adolescence. Ainsi, on y découvre notamment les motivations multiples attachées à cette pratique :

  • Le besoin d’évaluer son potentiel de séduction, à l’âge où se dessine l’image de soi.
  • Le goût du défi faisant apparaître le sexting comme un rite de passage version 2.0.
  • Le désir de popularité via la quête de likes sur les réseaux sociaux.

Des motivations qui ne tiennent malheureusement pas compte du risque de voir ses nudes (photos intimes) tomber entre de mauvaises mains…

Le revenge porn dès l’adolescence

Dernier né des anglicismes associés aux pratiques à risque, le revenge porn s’est invité dans l’enceinte des lycées. Le principe ? Diffuser des images intimes de « son ex » sans son consentement. Et cela souvent dans le seul et unique but de lui nuire après une rupture.

Un silence pesant

La diffusion d’images à caractère pornographique mettant en scène un mineur expose à une peine maximale de 5 ans d’emprisonnement. Mais aussi à 75 000 euros d’amende (article 227-23 du Code pénal). Toutefois, les cas de revenge porn en lycée débouchent rarement sur des sanctions judiciaires. L’explication ? Les victimes préfèrent souvent garder le silence par peur du qu’en-dira-t-on.

Des éducateurs démunis

Un article paru dans le journal Le Monde en mars 2020 lève le voile sur les difficultés rencontrées par les lycées dans les affaires de revenge porn. Comme le rappelle Véronique Martin, infirmière scolaire à La Rochelle, « on ne peut pas virer quarante élèves qui ont partagé une vidéo ». Une insuffisance de sanctions qui fait le lit des situations de cyberharcèlement !


L’essentiel

  • Avant l’âge de 12 ans, 4 enfants sur 10 ont déjà visionné des contenus pornographiques en ligne.
  • Ces contenus donnent aux enfants une vision erronée des relations amoureuses.
  • Le sexting consiste à envoyer des messages à caractère sexuel sous forme de textos, de photos ou de vidéos.
  • Le sexting permet aux adolescents de jauger leur potentiel de séduction.
  • La pratique du revenge porn expose à une peine maximale de 5 ans d’emprisonnement et 75000 euros d’amende.
  • Les jeunes victimes de revenge porn gardent souvent le silence par peur du scandale.

Pour aller plus loin

En mars 2019, la psychologue clinicienne Alessandra Conti a animé une soirée débat sur le thème de la sexualité chez les jeunes à l’ère du numérique. Une mine d’informations à l’usage des parents !